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III - DES PREMIERS PRIMATES AUX AUSTRALOPITHEQUES
A ce jour et en remontant dans le temps et dans l'ordre des primatesles
dents et les mâchoires du plus ancien représentant de cet ordre
ont été découvertes en 1965 dans les Montagnes Rocheuses (États-Unis
d'Amérique) et a été appelé Purgatorius.
Figure n° 3 : Reconstitution de Purgatorius.
Voici environ soixante-dix millions d'années, vers la fin du Crétacé
(dernier âge de l'ère secondai-re), cet animal de quarante-quatre
dents vivait vraisemblablement dans les arbres en se nourrissant
de fruits et d'insectes. De la taille d'un petit rat, il côtoyait
des dinosaures de six à huit mètres.
Avec quelques jalons conducteurs, une autre étape survient vers
cinquante millions d'années avec Plesiadapis qui, de la taille d'un petit écureuil, était probablement semi
arboricole et semi terrestre. Découvert d'abord dans le Bassin
Parisien, et décrit dès 1877, puis dans les Montagnes Rocheuses
et l'Ouest des États-Unis d'Amérique, son domaine était celui
du continent alors unique de l'hémisphère nord, formé de ce qui
deviendra l'Amérique du Nord, le Groënland et l'Europe et sur
lequel la température était comprise entre 15 et 20°C.
Ce continent euraméricain, séparé de l'Amérique du Sud, de l'Afrique
et de l'Asie, est le berceau de l'ordre des primates.
Un autre jalon se situe aussi autour de cinquante millions d'années
avec l'apparition et le fort développement du sous-ordre des Strepsirhiniens
(neuf familles et une cinquantaine de genres dont vingt actuels).
Le représentant le plus connu est un membre de la famille des Adapidae, Adapis parisiensis (mis au jour en 1821 au cur de Paris). Doté de quarante dents,
il devait beaucoup ressembler aux lémuriens actuels.
Ces Adapidae seraient les ancêtres du sous-ordre des Haplorhiniens lui-même
subdivisés en deux infra-ordres, ceux des :
- Tarsiiformes qui comprennent les familles des Omomyidae et des Tarsidae ;
- Simiiformes qui comprennent les familles des Platyrhiniens (ou
Singes du Nouveau Monde) et des Catarhiniens (ou Singes de l'Ancien
Monde), dont fait partie l'Homme.
Les Omomyidae couvrent tout l'hémisphère nord, dont l'unique continent est
alors agrandi de l'Asie. L'un des plus connus est Necrolemur,
mis au jour en France dans le Quercy et décrit en 1873. C'était
un petit singe aux grands yeux, avec trente-quatre dents, et dont
le squelette indique qu'il pouvait se redresser aisément. Les
Omomyidae donneront naissance, vers moins quarante-deux millions d'années,
aux Simiiformes.
Figure n° 4 : Reconstitution de Necrolemur.
Ces Simiiformes partagent notamment comme caractères un grand
développement du crâne cérébral aux dépens de la face et une symphyse
mandibulaire soudée. Les plus anciens représentants connus de
leur famille des Catarhiniens ont été mis au jour en Égypte à
quatre-vingt-dix kilomètres au sud-ouest du Caire dans les dépôts
du bassin du Fayoum. Ces dépôts, datés de -36 à -25 millions d'années
alors que la région était le domaine de la forêt tropicale avec
de grands fleuves, ont livré, sur trois cents mètres d'épaisseur,
six genres différents de primates. Les trois genres les plus primitifs
sont groupés dans la famille des Parapithecidae (Parapithecus, Qatrania et Apidium), les trois autres genres (Oligopithecus, Propliopithecus et Aegyptopithecus) en deux familles (Cercopithecidae et Propliopithecidae).
Figure n° 5 : Crâne et reconstitution d'Aegyptopithecus.
Parapithèque était un petit singe possédant trente-six dents et
Oligopithèque un singe encore plus petit (trente centimètres)
présentant une denture de trente-deux dents de composition identique
à la nôtre avec des caractéristiques évoquant un régime alimentaire
folivore et insectivore. Toutefois la morphologie de ses canines
et de sa première prémolaire inférieure le mettent moins dans
la lignée de nos ancêtres que Propliopithecus et Aegyptopithecus, un quadrupède arboricole d'environ sept kilogrammes daté de
moins trente millions d'années. Ces deux derniers, que certains
scientifiques ne distin-guent pas, représentent peut-être les
ancêtres de tous les autres primates supérieurs de l'Ancien Monde
car leurs dentures de trente-deux dents offrent de nombreux traits
communs avec celles des hominidés. Toutefois, ce peut être le
fait, voici moins trente millions d'années, d'une adaptation semblable
à un régime alimentaire fait de végétaux fibreux, raison pour
laquelle les Propliopithecidae ont été placés dans la superfamille des Hominoïdae.
De belle taille, ils conservent des traits très anciens comme
un long museau et des os du nez proje-tés très loin en avant,
de grandes orbites, .... Leur squelette est celui de quadrupèdes
terrestres et de grimpeurs agiles, avec pieds et mains préhensiles
et longue queue, possédant un cerveau de 27 cm3.
Toutefois, des découvertes successives très récentes, en Chine
puis en Thaïlande, de fossiles très anciens ayant appartenu à
des primates anthropoïdes (dont Siamopithecus, qui vivait voici moins trente-cinq millions d'années et pesait
entre six et sept kilogrammes) montrent que l'antériorité des
premiers singes anthropoïdes ne peut plus être attribuée, sans
discussion, aux fossiles d'Afrique du Nord.
Par ailleurs, si des traits communs permettent de suivre le passage
d'un sous-ordre à un autre et d'une famille à une autre, les fossiles
pour l'instant mis au jour sont trop spécialisés pour pouvoir
affirmer qu'ils représentent véritablement nos ancêtres. D'ailleurs,
l'accord n'est pas total dans la communauté scientifique pour
placer Purgatorius et Plesiodapis dans l'ordre des primates.
Au Miocène inférieur, dans la période de temps de -23 à -18 millions
d'années, le groupe des dryopithèques semble le plus proche de
nos racines et va donner tout au long du Miocène de très nombreux
descendants qui seront mis au jour dans de nombreux pays d'Europe
mais aussi au Pakistan, en Inde, en Chine et en Afrique. Ces dryopithèques
d'Eurasie ont les mêmes caractères que ceux d'Afrique.
Figure n° 6 : crâne et reconstitution de Dryopithecus (Proconsul).
Parmi ceux-ci, avec une taille pouvant atteindre celle de la femelle
du gorille, avec une face modérément projetée, ... et un cerveau
de 150 cm3, Dryopithecus africanus (le Dryopithèque africain ou Proconsul du nom -Consul-
d'un chimpanzé célèbre du zoo de Londres) paraît être l'un des
ancêtres les plus plausibles de l'Homme. Toutefois, Morotopithecus bishopi, découvert en 1996 en Ouganda dans des terrains de vingt millions
d'années, est présenté maintenant comme ce plus vieil ancêtre
de l'homme et des grands singes, mais des scientifiques le trouvent
trop grand et avec des caractères déjà très spécialisés.
C'est alors que, vers -17 millions d'années, un évènement géologique
entraîne des conséquences climatiques et paléontologiques considérables.
La plaque continentale afro-arabe entrant en contact avec la plaque
eurasiatique ferme le passage entre la mer Méditerranée et l'océan
Indien que permettait jusque là la mer Tethys. Le régime des vents
est modifié, le climat fraîchit et s'assèche, la végétation arborée
diminue et ... de nombreux animaux passent, dans les deux sens,
d'une plaque continentale à l'autre. Les hominoïdes vont continuer
à se diversifier sur les autres continents avec notamment Sivapithecus (découvert au Pakistan par David Pilbeam), Ramapithecus (découvert en Inde), Ouranopithecus (découvert en Grèce par Louis de Bonis), Oreopithecus (découvert en Italie), ..., chacun étant considéré lors de sa
mise au jour comme notre ancêtre. En fait ils seraient tous dans
la lignée des orang-outans.
Au Miocène moyen (-14 à -12 millions d'années), c'est encore en
Afrique que Kenyapithecus (qui pourrait être un Ramapithèque et que certains pensent être
le prédécesseur immédiat des australopithèques) et surtout Otavipithecus paraissent les plus proches de notre lignée. Ils précédent au
Miocène supérieur (-11 à -5 millions d'années) Samburupithecus (-9,5 millions d'années) puis Praeanthropus africanus (ou si l'on préfère Australopithecus anamensis). Ce dernier, dont les os fossiles mis au jour sont très proches
de ceux de l'homme actuel, montre que la station et la locomotion
bipèdes étaient déjà acquises voici moins 4,5 millions d'années,
ce qui pourrait impliquer que le passage d'une locomotion de type
grand singe à la locomotion humaine se soit effectué vers - 8
ou -7 millions d'années ... avant que la savane n'ait remplacé
la forêt.
Si les hominoïdes fossiles du Miocène (-25 à -5 millions d'années)
sont très nombreux à pouvoir prétendre jouer un rôle dans les
origines de l'Homme, nombre de ces grands singes sont trop grands
ou présentent des caractères trop particuliers pour être placés
dans la lignée humaine. Aussi en dépit de la multiplication des
mises au jour de nouveaux fossiles, du progrès des connaissances
tant dans le domaine des paléoenvironnements que dans celui de
la biologie moléculaire, il est toujours impossible aujourd'hui
de dire avec certitudes et détails quel est le groupe de préhominidés
qui a donné naissance aux hominidés.
Proconsul vers -20 à -18 millions d'années, Otavipithecus vers -13 à -12 millions d'années, Samburupithecus vers -10 millions d'années et Praeanthropus africanus vers -4,5 à -3,5 millions d'années paraissent former aujourd'hui
les chaînons débouchant sur les australopithèques parmi lesquels
l'Australopithèque du Bahr el Ghazal est aujourd'hui le candidat
le plus crédible au rôle d'ancêtre du genre Homo. |
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