| Le puzzle de nos origines se complique encore
 Le crâne découvert le 19 juillet dans le désert tchadien va-t-il
						bouleverser notre arbre généalogique ? A chaque nouvelle découverte
						d'ossements fossiles d'hominidés de 1 à 6 millions d'années, l'histoire
						de nos origines semble se brouiller un peu plus. C'est que les
						paléontologues tentent de reconstituer l'évolution d'Homo sapiens et ses ascendants, à partir d'indices peu nombreux et très ténus.
						C'est pour cela que la découverte d'un crâne entier, vieux de
						plusieurs millions d'années (il s'agirait dans le cas présent
						de 6 millions d'années), constitue toujours un événement d'importance.
 Jusqu'en 1995, tous les fragments de grands singes et d'hominidés
						ont été retrouvés à l'est de la grande cassure géologique qui
						parcourt l'Afrique, de l'Ethiopie au Malawi, sur plus de 3.000
						kilomètres. L'ouverture de ce Rift, il y a quelque 8 millions
						d'années, a provoqué, selon le scénario défendu par le Pr Yves
						Coppens, une sécheresse sur son flanc est. Ce bouleversement climatique
						aurait contraint les grands singes à s'adapter à la savane en
						adoptant progressivement la position debout. Et c'est ainsi qu'ils
						auraient progressivement évolué vers l'espèce humaine, leurs cousins
						occidentaux, arboricoles, donnant les espèces de singes actuels.
 Coup de théâtre préhistorique le 23 janvier 1995, lorsque Michel
						Brunet, de l'université de Poitiers, met au jour une mandibule
						très bien conservée d'un australopithèque de 3,5 millions d'années,
						au Tchad. Un contemporain de Lucy (3,2 millions d'années), voire
						un prédécesseur, trouvé à plus de mille kilomètres à l'ouest.
						Et qui plus est, un contemporain aux caractéristiques plus modernes.
						Le 18 juillet 2000, un nouveau fragment d'australopithèque était
						trouvé au Tchad, par Fanoné Gongdibé, un chercheur qui a participé
						à la découverte du 19 juillet dernier. Un epreuve de plus qu'une
						branche d'australopithèque s'est développée bien à l'ouest du
						Rift.
 Le nouveau primate tchadien vieux de 6 millions d'années pourrait-il
						être un ancêtre d'Abel et de l'autre australopithèque trouvé l'année
						dernière ? Pourrait-il même être l'ancêtre des pré-humains d'Afrique
						de l'Est ? Une autre découverte récente, et jugée très importante
						par Yves Coppens, permet d'en douter. L'année dernière, un hominidé
						de 6 millions d'années, doté d'une caractéristiques d'une bipédie
						maîtrisée, a été mis au jour au Kenya par Martin Pickford et Brigitte
						Senut, Orrorin tugenensis, que l'on a surnommé Millenium ancestor. Bien que très ancien, Orrorinn est plus humain que Lucy, par exemple.
 Aux schémas simplistes qui dominaient il y a trente ans, les paléontologues
						substituent aujourd'hui celui d'une famille préhumaine foisonnante,
						beaucoup plus diversifiée que l'on pensait. Et dans cette famille
						de plus en plus nombreuse, il est de plus en plus difficile d'identifier
						notre ancêtre direct
 .
 Fabrice Nodé-Langlois
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