SCIENCES ET AVENIR juillet 2003

Grandeurs et bassesses d'une découverte.

Toumaï, l'aventure humaine.

Rachel Fléaux-Mulot

"C'est trop grave pour nous. Cela va être le début des ennuis !". En juillet 2001, quatre hommes sont pétrifiés par l'émotion dans la fournaise du désert du Djourab au Tchad. L'un d'eux, l'étudiant Ahounta Djimdoumalbaye a mis la main sur une pépite fossile : le crâne de Toumaï, un hominidé de 6 millions d'années. Le géographe français Alain Beauvilain, membre de l'expédition, raconte avec simplicité l'histoire réelle de cette trouvaille qui a fait le tour du monde. On y découvre les rudes conditions de travail des "fouilleurs", la lutte des paléontologues, sans cesse une sébile à la main pour obtenir des crédits. On y apprend aussi la rivalité du milieu. Absent des fouilles, alors en son université de Poitiers, le véritable patron de la mIssion de coopération franco-tchadienne, le paléontologue Michel Brunet, n'appréciera pas du tout que le quatuor des découvreurs présente Toumaï aux autorités tchadiennes et se fende d'un communiqué - même court - à destination de la presse avant qu'il n'ait examiné la trouvaille. Il saura ramener la couverture à lui, partant même "découvrir" le site de fouilles (sur lequel il n'avait jamais mis les pieds) pour une photographe, une copie de Toumaï à la main. Alain Beauvilain, lui, devra quitter le Tchad après 24 ans de coopération en Afrique centrale.