Prise de tête autour de Toumaï
Querelle de scientifiques autour de la découverte de notre vieil
ancêtre.
Par Sylvie BRIET
Toumaï, le plus vieil ancêtre de l'homme, découvert en 2001 au
Tchad, se retrouve au centre d'une querelle qui sera portée en
justice la semaine prochaine. Michel Brunet, professeur à Poitiers,
père scientifique de cet hominidé de 7 millions d'années, à qui
l'on attribue la découverte, n'est pas content. Il veut faire
retirer de la vente le livre d'Alain Beauvilain, géographe, maître
de conférence à Paris X, Toumaï, l'aventure humaine (1). Motif
: l'auteur n'avait pas le droit de publier des photos sans certaines
autorisations.
Fossile. Alain Beauvilain y raconte comment, lors d'une expédition menée
avec trois Tchadiens, Mahamat Adoum, Ahounta Djimdoumalbaye et
Fanoné Gongdibé. Ahounta a découvert le crâne ce 19 juillet 2001.
A la une du livre, la photo prise au retardateur des quatre membres
de l'expédition tenant le précieux fossile qui vient d'être mis
à jour. «Cette mission n'avait pas été initiée par Michel Brunet»,
dit Beauvilain. Détaché au ministère des Affaires étrangères et
responsable de la coordination des actions en paléontologie en
République du Tchad, celui-ci connaît parfaitement le terrain
et a participé à toutes les missions de Brunet. Il en mène quelques
autres, plus informelles mais toujours pour le compte de la mission
paléoanthropologique franco tchadienne (MPFT) dirigée par Brunet.
Equipe. Michel Brunet apprend cette découverte après les autorités et
la presse tchadiennes. Il lui est difficile de réagir avant d'avoir
vu le fossile. Au Tchad, tout le monde s'emballe. A partir de
là, Alain Beauvilain se sent évincé, aucune reconnaissance ne
lui est manifestée côté français. Il est néanmoins cosignataire
de l'article publié par Michel Brunet dans la revue Nature du
11 juillet 2002, comme tous les membres scientifiques de l'équipe.
Mais le dossier de presse et les récits aux journalistes ne mentionnent
que le seul Ahounta. «C'est normal, explique Patrick Vignaud,
bras droit de Michel Brunet à Poitiers, cette découverte est le
résultat du travail de toute une équipe, Michel Brunet en est
le directeur scientifique, Ahounta le découvreur. Après, nous
sommes 60 dans l'affaire, chacun apporte quelque chose.» Aujourd'hui,
le président tchadien se rend à l'université de Poitiers, où se
trouve le crâne de Toumaï.
(1) Editions La table ronde.
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